Philippe Clergeau, Professeur d’écologie au Muséum National d’Histoire Naturelle (MNHN) in Les bienfaits du végétal en ville, édité par Cité Verte* – Février 2014
« Parmi les services écosystémiques applicables aux systèmes urbains, on notera que l’approvisionnement est aujourd’hui celui de moindre enjeu. A l’inverse, les services culturels sont les plus forts (cadre de vie, lien social, esthétique, loisir, limitation des départs des citadins vers le périurbain…).
Les services de régulation environnementale sont, eux, beaucoup plus importants qu’on ne le pense. Le rôle des espaces verts dans la régulation hydrique est bien connu et les effets d’imperméabilisation dans certaines régions à très forte urbanisation ont été suffisamment démonstratifs pour imposer des contraintes d’urbanisme (par exemple inondations dans la Ruhr).
Le rôle des végétaux pour lutter contre les pollutions atmosphériques urbaines et fixer le CO2 est également connu mais nécessite d’être précisé. Un des arguments les plus forts d’une nature en ville aujourd’hui est certainement l’effet de la végétation sur le climat local. Les arbres peuvent baisser de 2 degrés la température d’une rue et dans un contexte de changement climatique, ce rôle prend un intérêt évident.
La notion de biodiversité (variété en écosystèmes, espèces et gènes et leurs interrelations) est au cœur de la nature en ville et transversale aux différents services rendus. Elle intervient dans l’approvisionnement, les services culturels et surtout les régulations environnementales. La présence de nombreux insectes permet par exemple d’avoir des pollinisations (et donc fruits et graines) aussi en ville…
C’est en multipliant les espaces à caractère naturel de qualité, c’est-à-dire riches en ressources pour les plantes et les animaux, qu’une biodiversité minimale peut s’installer. Plus elle sera importante, plus on tendra (tendre seulement, la ville ne sera jamais un milieu naturel) vers des fonctionnements efficaces et une certaine stabilité. C’est bien en ayant de nombreuses espèces dans les sols que ceux-ci peuvent retrouver leurs dynamiques et leurs horizons, donc impliquer une gestion plus faible (moins d’intrants, de désherbage, d’espèces invasives).
À une échelle locale, la gestion des parcs permet l’installation de plus d’espèces en ville qu’auparavant mais à une échelle plus globale, seul le développement d’un maillage vert (trame verte avec plus ou moins de continuités) permettrait de maintenir une biodiversité ordinaire jusqu’au cœur de la ville et pourrait jouer un rôle dans la transparence régionale. Il s’agit là de limiter les effets de coupure que représentent les grandes métropoles à la dispersion des espèces vers le nord suite au changement climatique.
Un tel maillage, qui doit inclure aussi la végétalisation des bâtiments et espaces privés, peut modifier l’appréciation du vivre en ville. Cela permettrait non seulement de limiter les mitages périurbains (et donc les destructions d’habitat), mais aussi de densifier sans augmenter obligatoirement le nombre de grands parcs. »
Source et crédits photographiques
- Val’ hor – Plante & Cité : http://www.valhor.fr/fileadmin/A-Valhor/Valhor_PDF/CiteVerte_BienfaitsVegetalVille2014.pdf