L’abbaye de Royaumont compte trois jardins dont un nouveau qui sera inauguré fin juin 2014; le jardin du cloître, le jardin des neufs carrés.
Le site de Royaumont a gardé certaines de ses caractéristiques médiévales. Les moines captent une source distante de 3 km pour l’alimentation et les ablutions ; ils canalisent aussi, loin en amont, deux rivières qui se subdivisent en un bras contournant l’abbaye, tandis que l’autre rentre dans le domaine et traverse les latrines qu’il nettoie avant de devenir souterrain. Ces canaux sont encore visibles aujourd’hui.
Durant la première moitié du XIXe siècle Royaumont est transformée en filature et de nouveaux canaux se greffent aux anciens pour apporter l’énergie aux machines et aider au nettoyage des étoffes. Plus tard, le canal, destiné aux besoins de la blanchisserie, sera agrandi en grands miroirs dans le seul souci d’agrémenter le parc. Aujourd’hui, ces canaux qui ont perdu leur vocation première constituent l’un des éléments décoratifs les plus attrayants du parc de l’abbaye.
A partir de 1870, des religieuses installent un noviciat dans les murs abandonnés et dégradés par les industriels ; elles font disparaître les dommages commis par ces derniers et redonnent vie à l’abbaye. Le long des canaux, des allées sont dessinées et bordées de marronniers ; un style mixte caractérise alors ce parc qui voit alterner parties régulières et pelouses géométriques, avec des bosquets, et une grotte qui abrite une pietà. La structure actuelle du parc est restée celle du XIXe et l’on peut toujours se promener à l’ombre
des marronniers.
Le jardin du cloître
La restauration du jardin en 2010, achève les travaux du cloître entrepris depuis 1996.
On ne sait si, au Moyen Âge, il est planté d’herbes médicinales ou laissé nu, comme l’austérité cistercienne le commande. Au XIXe siècle, les religieuses de la Sainte-Famille de Bordeaux découpent cet espace en 4 parties autour d’un bassin et en 1912, la famille Goüin, alors propriétaire de l’abbaye, confie au paysagiste Achille Duchêne le soin de redessiner ce jardin. Il le transforme alors en un ravissant petit jardin à la française, dans un style librement inspiré des parterres à compartiments de la Renaissance. La restauration du jardin, en 2010, achève les travaux du cloître entrepris depuis 1996.
Trait marquant de ce cloître, sa taille, et sa forme : de vastes dimensions, il est rectangulaire et non pas carré, ses galeries mesurant pour celles orientées est-ouest, 48,35 m, et 46,80 m pour les deux autres. Dans l’architecture et le décor du cloître, les végétaux sont stylisés, simplifiés et suggèrent la maîtrise de la nature qui doit rester harmonieuse. L’artiste plasticien
Yann Toma a conçu l’œuvre permanente Geysir Ouest-Lumière pour le bassin central.
Au repos, l’œuvre est consignée dans le cadre d’une citerne souterraine et du bassin lui-même. En phase active, elle culmine à une hauteur de sept mètres. Juste avant le jaillissement du geyser, on constate un effet de bouillonnement progressif qui préfigure l’événement.
Le jardin des neuf carrés
Le jardin d’inspiration médiévale est conçu pour accueillir des expositions sur les plantes.
Créé en 2004 par Damée, Vallet & Associés Paysagistes (DVA), le jardin d’inspiration médiévale, dit Jardin des 9 carrés, évocation paysagère du monde médiéval, est conçu pour accueillir des expositions sur les plantes, leurs usages et les regards que l’on porte sur elles.
Ce jardin explore, à chaque nouvelle collection de plantes, un aspect du rapport complexe de l’homme avec la nature au Moyen Âge comme à l’époque moderne. La structure du jardin, en osier vivant tressé, enserrée entre le réfectoire et les cuisines des moines, est visible toute l’année et les plantes restent en place de façon naturelle tout au long de leur cycle.
La première exposition conçue et organisée par DVA portait sur les plantes d’Hildegarde de Bingen, sainte et savante illustre du Moyen Âge. En 2007, c’est un voyage coloré dans le monde de la teinture végétale du Moyen Âge à nos jours qui était proposé, en 2010, le thème de la magie des plantes.
Depuis 2013, une nouvelle collection de plantes comme « signes et emblèmes » est présentée et amène à découvrir comment la symbolique des plantes, toujours vivante aujourd’hui, s’est intégrée à notre culture.
Le potager-jardin, un potager du XXIè siècle
Créer un potager à Royaumont, c’est renouer avec le passé d’une abbaye prestigieuse et ancrer un geste contemporain dans une tradition séculaire. Longtemps, les abbayes ont été à la fois conservatoire et champ d’expérience des méthodes et des savoirs. La vocation contemporaine de Royaumont ne rompt pas avec cette tradition.
Réalisé en 2013, ce projet concilie l’organisation formelle du potager traditionnel avec un mode de production original des végétaux comestibles.
Aux côtés des classiques et emblématiques sillons du potager, les concepteurs mettent en contrepoint une organisation culturale libre et irrégulière en cellules potagères, inspirée des mixed-borders des jardins anglais. Largement expérimentale, proche de la permaculture, cette organisation “ensauvagée” s’appuie sur les capacités de régénération et de réensemencement naturel propre à chaque plante.
Le jardin est comme un tapis végétal déroulé sur le sol, sans rupture de niveau, respectueux du site dans lequel il s’inscrit. Son tracé évoque le jardin lapidaire constitué par les ruines de l’abbatiale cistercienne, la forme des carrés s’inspire de celles du potager classique. Le Potager-jardin est un lieu d’inspiration et d’expression pour les artistes, un espace voué au calme et à la détente, un jardin de découverte pédagogique.
La composition fonctionne par contraste entre les haies qui structurent l’espace et la sarabande végétale. Six carrés de 18 m de côté, une palette et une prairie-verger, structurent la parcelle de 9 000 m2 qui accueille 160 variétés de légumes, 3 000 plants et 60 fruitiers (pommiers, poiriers, cerisiers) taillés en forme quatre bras, cordon ou sur tige.
Le dessin s’organise autour du carré central, dédié à l’espace technique du jardinier. Les cinq autres carrés offrent un cadre structurant de haies persistantes d’ifs et de buis de différentes hauteurs aux cellules irrégulières des mixed-borders où sont librement dirigées les cultures de végétaux comestibles. En opposition, une palette de référence permet l’identification des plantes utilisées en les présentant en sillons, en référence au maraîchage traditionnel.
Les végétaux utilisés dans les carrés, essentiellement composés de vivaces, de bisannuelles et d’annuelles, sont choisis pour être les plus proches des espèces botaniques dont sont issues les variétés horticoles. Le Potager-jardin est un terrain d’innovations dans le domaine des cultures potagères, un laboratoire de la biodiversité. S’inscrivant dans les démarches innovantes des néo-jardiniers écologiques, il n’a théoriquement pas besoin d’arrosage. Celui-ci est réduit à ce que nécessite temporairement l’acclimatation des espèces introduites.
Une gestion “Zéro Phyto” est bien entendu appliquée sur l’ensemble du jardin.
Sources :